jeudi 9 avril 2015

La possibilité


Des tréfonds de la mer / Un élan intranquille
Faussement malhabile / Albatros à l’envers
Là-bas sous la paupière / Un morceau de soleil
Promesse d'adolescent / Fleur sur fumier fumant
L’eau court dans la plaine 
Descend vers la ville
Cherchant la possibilité d’une île  
Ou presque

mercredi 8 avril 2015

Ca ne prouverait rien.

- Bonjour.
- Bonjour.
- J'ai une question.
- Allez-y.
- Comment peut-on savoir si l'on pense bien ?
- C'est-à-dire ?
- Si on s'abuse soi-même sous l'effet d'un état exceptionnel, par exemple. 
- Vous vous connaissez un peu non ?
- Oui un peu. 
- Alors ?
- Alors je ne sais pas. Je ne sais pas si mon état est plus ou moins lucide que d'habitude. Qu'avant.
- Ah.
- Oui, parfois, on ne sait plus si on se réveille d'un sommeil ou si l'on y plonge. Vous savez, comme ces rêves dans lesquels vous êtes certain de ne pas rêver. Un genre de chute de la conscience dans le magique.
- Sartre.
- Ah bon ?
- La chute de la conscience dans le magique, c'est l'entrée dans le monde de l'émotion, comme on parle d'un monde du rêve ou de la folie. 
- D'accord...
- Vous avez un exemple ?
- Oui. Je sais voler. Non, non, vraiment. Je sais voler. Oh, pas comme un oiseau, mais je vole vraiment. C'est difficile, mais possible. Je l'ai fait plusieurs fois. Il faut s'appuyer sur l'air, délicatement. On sent la pression sous ses paumes. Il faut y aller tout doucement, petit à petit. Ca ne marche pas toujours du premier coup, il faut y croire, avoir la foi, recommencer, encore. Les premiers mètres d'élévation sont laborieux, il ne faut pas craindre de manquer de grâce, la grâce viendra plus tard, mais on finit par s'élever. Tout le monde n'y parvient pas, il faut une certaine dose de lâcher-prise, comme on dit, mais c'est possible, j'ai appris à une amie. On a volé ensemble une fois. Quand on commence à maîtriser son corps dans l'espace et que l'on prend confiance, la sensation est assez merveilleuse, on peut prendre de la vitesse, se lancer en piqué et incurver sa trajectoire. Ca se fait au feeling. C'est rond, doux. Rond, oui. Très instinctif. Bref, quand je vole, je sais bien que je ne rêve pas. 
- ...
- Vous ne me croyez pas ?
- Qu'est-ce que vous essayez de me dire là ?
- Je ne sais pas, qu'il est difficile parfois de savoir si l'on doit se faire confiance ou pas. 
- Mais vous pensez que vous savez voler ?
- Quand je vole, bien sûr que je pense que je sais voler. Mais là, devant vous, j'ai un doute, oui.
- Vous avez un doute ?
- Oui. Pour savoir, il faudrait que j'essaie de voler. Mais devant vous, c'est pas sûr que ça marche, vous êtes tellement rationnel. Alors ça ne prouverait rien.
- On regarde quelque chose d'autre alors ?
- Si vous voulez.