La photo de Thomas Struth, j'ai dû la découvrir en 1999 ou 2000. Ce n'est pas son image la plus spectaculaire, mais elle m'a tout de suite aspiré : la tache d'ombre au premier plan, le virage d'où va surgir la Giulietta de Michel Piccoli, mais surtout ce bois sombre et mystérieux sur la droite, cette porte vers l'extérieur du cadre.
Ai-je pensé au petit tableau en voyant cette image pour la première fois... c'est probable même si je ne m'en souviens pas.
Ce qui est certain, c'est qu'en me promenant sur cette petite route du bocage normand à l'automne dernier, le tableau lillois et la photo de Struth m'ont sauté aux yeux d'un bond d'un seul. Tout était là : la teinte des feuilles au sol qui rappelle le toit de la ferme, le virage en miroir, le ciel d'orage, les verts tendres et les verts sombres, ce noir, et même l'indispensable perspective (même si plus subtile).
Mais ces détails ne disent rien. Ce qui me pousse à revenir inlassablement sur cette triple image (et je le réalise seulement à l'instant) c'est plus sûrement le choix qu'elle propose. Le regard penche d'un côté puis de l'autre, et retour et encore, alors la pensée abandonnant l'oeil prisonnier de son incessant va-et-vient se fixe sur l'alternative : courir vers l'ouest, la lumière, le feu de cheminée, le chocolat chaud, l'étable, les vaches dans les prés, les coquelicots... ou bien s'enfoncer dans le bois, pour s'y perdre, y rencontrer la sorcière et sa pomme, le chasseur, le loup, la vipère, le vent froid de la nuit...
A la frontière des mondes possibles, la liberté grande.
De Cuincy à Planque (?) - Auteur inconnu - 24-VIII-II |
Waldstrasse auf dem Lindbergh / Landscape n°3 - Thomas Struth - 1992 |