samedi 11 mars 2017

Au centre du monde, juste au-dessus


Il est à une vingtaine de mètres au-dessus du sol, depuis plusieurs heures, maintenant. Une rupture de pesanteur. Il n’a même pas besoin de battre des bras, il caresse l’air du bout des doigts, c’est suffisant. C’est ici qu’il se retrouve. Là où le monde ne tourne plus, ou si parfaitement que le mal au cœur s’est exilé sur une autre planète. Et les doutes et les peurs. Ici, le cœur est on ne peut mieux, à l’aplomb de la tête et du cul. A la verticale, quoi, pas besoin de faire un dessin. De toute manière, il ne sait pas dessiner, il écrit mal, et c’est à peine s’il parle, mais pour s’asseoir sur un axe invisible, nul besoin d’avoir du génie, il suffit de recevoir la grâce (appelez ça comme vous voudrez, mais le vocabulaire religieux semble le plus indiqué). Il tire un peu les rideaux car le centre du monde se situe dans une ville ensoleillée : Perpignan selon Dali, Nazareth si l’on en croit Jésus, mais il opterait plutôt pour Lisbonne, ou Naples. Tout à l’heure, on ira manger des gnocchi à l’encre de seiche, ou un vitello tonnato, avec un verre de vin fruité. On est en week-end, ou en RTT (on ne se retrouve pas comme ça en semaine au milieu d’une réunion, fut-elle sur l’aménagement du temps de travail), on a le temps, la respiration peut se poser, le corps peut se recaler. Il règne un silence inhabituel, et les rares humains que l’on croise sont souriants et doux comme le temps qu’il fait, on a du mal à croire que tout ça est bien réel. Il cherche les mots, ne les trouve pas. Il cherche encore. Il est bien. Très bien. Si bien. Tellement bien. Il abandonne la recherche et s’abandonne.