mardi 24 avril 2012

Calme

La nuit sera calme, dit Romain Gary, qualifiant probablement celle éternelle entre toutes qui succédera à ses jours qui le furent si peu. En lisant les souvenirs et la pensée de ce jeune homme de soixante ans à l'époque de son entretien avec François Bondy, j'ai le sentiment assez net de vivoter. Je vivote. Oui, c'est ça. Quelle tiédeur face au Romain qui brûle (et encore, en parlant de tiédeur, je me flatte sans vergogne). Si les hommes sont inégaux sous bien des aspects, la vitalité n'échappe certainement pas à la règle. Quelle est cette énergie mystérieuse qui fait embrasser tout ce qui passe à portée ? Quel est ce bois dont sont faits les destins ? Ce matin, confortablement attablé sur une terrasse de Syracuse, le regard tendu sur l'imperturbable horizon de la mer Ionienne éblouissante, je me lamente non sans quelque volupté sur mon impardonnable timidité. Car ce qui me désole à la lecture du "cosaque un peu tartare mâtiné de juif", ce n'est pas l'insignifiance de mon passage sur terre comparé au sien (je n'ai tout de même pas cette arrogance) mais bien cette réserve (ou cette retenue) dont je fais souvent preuve et que l'on pourrait généreusement attribuer à une bonne éducation voire à une certaine forme de sagesse quand il s'agit plus véritablement dans la plupart des cas d'une vulgaire démonstration de faiblesse.