jeudi 16 avril 2020

Celle-là

On n'avait rien connu de tel, rien d'autre que les événements de nos vies, amours, naissances, fêtes, deuils, chacun, chacune, quelques attentats, une coupe du monde ou deux. On n'avait rien connu qui nous dépasse à ce point, pas de guerre, à la baïonnette ou nucléaire, ni famine, cataclysme, tremblement de terre, déluge. 
Un truc qui nous rabaisse notre caquet, qui nous renvoie avant google, contre lequel notre meilleure défense est de nous terrer dans nos grottes, à l'intérieur de nous-mêmes, où l'on trouve peu de pépites, quelques gouffres, plus souvent notre ordinaire, mais le nôtre, un peu plus au moins que quand on courait devant soi. Sans même y penser, on est là. Alors on se perd, tranquillement ou pas, mais autrement. On se perd beaucoup plus profondément quand on ne peut plus s'éloigner. Et quelle surprise d'être arrêté. Ce n'était tellement pas le plan. C'était tout simplement impossible. Plusieurs semaines arrêtés pourtant, suffisamment déjà pour découvrir que nos pensées évoluent de l'une sur l'autre, que certaines idées se confirment quand d'autres s'évaporent ; pour s'assurer que ce qui nous manque nous manque cruellement, et que ce n'est pas un ce, mais un qui, même si manquent aussi l'espace et la liberté, mais pour quoi en faire, sinon pour y retrouver l'autre, celui-là.