vendredi 10 avril 2020

Hell's bells

- Bonjour.
- Bonjour.
- Il y avait de la lumière, alors...
- Quelle lumière ? Ah, dehors...
- Oui, c'est fou ce soleil. Une fin mars et un début avril de rêve.
- Et, donc, vous vous êtes dit "je vais passer le voir".
- Exactement. Je ne sais pas exactement à quoi je pense, alors...
- Alors vous venez en parler.
- Bah oui. Je pense que ça a à voir avec l'attente.
- Ca se pourrait.
- Oui, qu'attend-on ? Seulement la fin de l'attente ou bien autre chose ? Un autre monde, une autre vie...
- Oui, la fin d'une attente n'est pas une fin en soi, on attend toujours quelque chose, et plus on attend, plus ce qu'on attend doit en valoir la peine.
- C'est ça. En valoir la peine, ou justifier l'attente. Ce n'est pas absolument rationnel, bien sûr. Concrètement, cette attente est la participation individuelle à un effort collectif qui vise à permettre la prise en charge d'un nombre de malades exceptionnellement élevé. Mais...
- Mais on ne peut pas demander à sa tête de s'en tenir là.
- Bah oui.
- C'est d'ailleurs assez étonnant comme on ne sait pas où vont aller nos pensées d'une semaine à l'autre, pour ne pas dire moins.
- Ah, vous aussi ?
- Oui, cette période rend humble. On voit bien qu'on comprend lentement, ce qui se passe, les conséquences, ... Et que nos pensées évoluent.
- C'est ça. Et ce qui se précise, à mesure que l'incertitude grandit, c'est le besoin d'espoir.
- Malgré la crise qui s'annonce, ou justement parce qu'elle s'annonce. Worse comes to worst.
- Oh là, en anglais s'il vous plait !
- Ne vous moquez pas, c'est une vieille chanson de Billy Joël, je crois... Ca m'est revenu comme ça.
- Ah oui, dans Piano Man. J'ai connu une longue période de confinement avec Billy Joël...
- Personne n'est parfait.
- C'est une autre chanson ?
- Oh, ça va. Et donc, vous vous dites quoi ?
- Que plus j'attends, plus j'attends, oui. Sans naïveté. Mais cette calamité est peut-être une opportunité.
- Pas pour tout le monde.
- Non, certainement pas pour tout le monde. Mais ce monde n'était pas non plus un paradis pour tout le monde, avant cette crise.
- Au moins, on ne peut plus dire qu'on est obligé de continuer comme ça, puisqu'on est à l'arrêt.
- C'est vrai. Cette attente demande un espoir à sa mesure.
- Une révolution ? Comme vous y allez...
- Une révolution, oui, c'est une idée. Sinon, on peut juste écouter quelque chose, si vous préférez. Comme d'habitude. Comme avant.
- Oui, je veux bien. Ca me rassurerait, je crois.
- Faisons ça, alors. A fond.